La carte et le territoire...

La seule manière pour Houellebecq de décrocher un Goncourt était-elle d'édulcorer son style ?

C'est la question que je me suis posée en refermant La carte et le territoire, prix Goncourt 2010 (je précise au cas où vous auriez passé ces derniers mois sur une autre planète que la notre). 

La base de ce roman est pourtant semblable aux autres livres de Houellebecq puisqu'il y est question de Jed Martin, artiste un peu paumé qui subit sa vie plus qu'il ne la décide. Il connaîtra pourtant son heure de gloire notamment en photographiant des cartes Michelin puis en dressant le portrait de travailleurs dans l'exercice de leurs fonctions. Mais entre ses déboires amoureux, le mal-être de son père et le mystère qui plane autour du suicide de sa mère, c'est bien d'un looser, figure chère à Houellebecq, qu'il s'agit.

Dans ce livre, qui par certains égards se rapprocherai presque d'une encyclopédie, Houellebecq se plaît à jouer au pédagogue (tout en ayant puisé ses sources sur Wikipédia, cf. la polémique qui a entouré la sortie du livre). En le refermant, vous n'ignorerez par exemple plus rien de la ville de Beauvais ou des mouches et de leur croissance...

L'autre originalité du livre, qui a d'ailleurs contribué à me le faire apprécier, est que Houellebecq y incarne un personnage à part entière. L'auteur joue d'ailleurs avec tous les préjugés qui entourent sa personne : un écrivain misanthrope, taciturne, seul et profondément dépressif qui vit seul au fin fond de l'Irlande et qui va connaître une fin plus que funeste.

Seulement voilà, pour avoir lu deux autres livres de Houellebecq peu de temps avant de m'attaquer à celui-ci, je me suis retrouvée quelque peu perdue. Si le style cru des particules élémentaires m'avait agacé et le cynisme d'extension du domaine de la lutte m'avait enchanté, je n'ai retrouvé ici aucune trace de la subversion propre à Houellebecq. Certes il y a une mort violente et plutôt répugnante dans ce livre, mais nous sommes loin de la critique acerbe de la société à laquelle Houellebecq pouvait se livrer dans ses précédents livres.

A tel point qu'à la fin on se demande : tout ça pour quoi ? Pour un Goncourt certainement. 

Alors non, je ne dirai pas que je n'ai pas aimé ce livre, j'en ai même plutôt apprécié la lecture, je déplore juste le peu d'engagement que j'ai pu y trouver et cette sensation de me retrouver avec une version édulcorée entre les mains.

En tout cas, me voici quand même réconciliée avec ce cher Michel, ce n'était pourtant pas gagné d'avance...

Michel Houellebecq par Maxppp

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9 commentaires:

My Little Discoveries a dit…

Je n'ai jamais rien lu de Michel Houellebecq, son univers ne me tente pas trop je crois... Bonne soirée!

The Girl Next Door a dit…

C'est ce que je me disais aussi avant et grâce au club de lecture j'ai eu l'occasion d'en lire un, puis deux, puis trois... comme quoi !

The Working Girl a dit…

C'est son roman que j'ai le plus aimé! Débarrassé de ses gimicks stylistiques pseudo-trash et de sa posture figée de geek blasé, La carte et le territoire m'a donné l'impression de comprendre enfin le fond de la pensée Houllebecquienne. Sa vision, sa sensibilité, sa philosophie m'ont touchée.
Quant à l'évolution de son style, peut-être Houellebecq a-t-il mûri, tout simplement?

The Girl Next Door a dit…

C'est vrai que c'est un autre angle d'interprétation, il me tarde presque la sortie de son prochain livre pour justement voit s'il va continuer sur cette voie là.

Stéphanie a dit…

Merci pour cette chronique !
Je vais peut-être le lire !

Aurélie a dit…

Je n'aime pas, je n'aime pas.
Il a fallu les toutes dernières pages pour que je comprenne enfin toute l'utilité du roman, et en admire retrospectivement la structure.
Mais le style de Houellebecq me laisse vraiment froide. C'est le premier que je lis de cet auteur, et hormis la fête chez Jean-Pierre Pernault que j'ai trouvée excellente et une ironie habilement dissimulée dans certaines phrases, j'ai lu le reste en baillant. La syntaxe et le vocabulaire sont pour moi sans originalité, c'est moche et plat, ça manque d'atmosphère, d'ambiance, ca ne transporte pas, ca n'a pas de rythme...
Pour résumer, il n'y a pas grand chose qui mérite d'être dit sur ce bouquin. Pour moi la sauc n'a pas pris. J'ai été très déçue...
Cela ne me donne pas trop envie de lire ses autres livres

unefilleaparis a dit…

Peut être fallait-il avec Houellebecq en passer de la détestation à l'admiration à finalement une relation plus saine avec cet auteur?!!
En tout cas, bravo d'avoir eu le courage et l'honnêteté interllectuelle de lire ces 3 romans pour vraiment te faire ta propre opinion!

alapage a dit…

J'ai vraiment déçue de ce choix littéraire ! je te laisse découvrir les deux articles que je lui ai consacré :
http://a.la.page.over-blog.com/article-la-carte-et-le-territoire-michel-houellebecq-58086169.html

http://a.la.page.over-blog.com/article-a-la-une-la-depeche-vient-de-tomber-60546883.html

anne charlotte a dit…

On me l'a offert, il est dans ma PAL je ne sais pas si je le lirais un jour.

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